Lettre ouverte du Maire de Manosque expliquant les raisons de sa démission du Conseil de surveillance de l’Hôpital Louis-Raffalli
Chères habitantes, chers habitants,
Je m’adresse à vous aujourd’hui avec une profonde amertume et une grande lassitude face à la situation inacceptable et préoccupante des urgences du Centre Hospitalier de Manosque. En janvier dernier, j’avais annoncé que si aucune amélioration notable n’était constatée d’ici le mois de juillet, je démissionnerais de la présidence du conseil de surveillance de l’Hôpital de Manosque.
Malheureusement, après 30 mois d’efforts et de multiples alertes adressées aux différents Ministres de la Santé et à l’Agence Régionale de Santé (ARS), nos urgences font encore et toujours l’objet de fermetures régulières et intempestives.
Le constat est sans appel : aucune mesure concrète ni décision décisive n’a été engagée par l’ARS pour permettre la réouverture de nos urgences. Notre système de santé et l’accès aux soins des habitants sont inlassablement malmenés par une technocratie incapable de faire des choix efficaces.
C’est donc avec regret et un certain sentiment d’impuissance que j’ai annoncé officiellement ma démission de la présidence du conseil de surveillance de l’Hôpital de Manosque, à compter du 1er septembre. Je ne me résigne pas, mais je ne peux cautionner plus longtemps l’inaction de cette Agence de Santé, qui malheureusement n’en porte que le nom.
Nous le savons, la France souffre d’un déficit de médecins urgentistes et cette situation s’est aggravée avec la réforme du statut des urgentistes, voulue et obtenue par le syndicat des urgentistes. Cette situation est le fruit de mauvais choix effectués depuis quarante ans par les différents gouvernements et professionnels de santé, quelles que soient leurs couleurs politiques.
À Manosque, sur les 16 postes de médecins urgentistes nécessaires, seulement 8 sont pourvus. À l’échelle des hôpitaux de Digne-les-Bains, Sisteron, Manosque et Pertuis, il faudrait 50 médecins urgentistes alors que nous n’en comptons seulement 30.
Plus largement, ce sont également les urgences de Brignoles, Draguignan et Aix-en-Provence qui se retrouvent en grandes difficultés actuellement. Alors qu’il faudrait former 1 500 urgentistes par an, nous n’en formons seulement 500, démontrant la crise des vocations que nous subissons, à l’échelle française mais également européenne. Des décisions difficiles sont devant nous, et le Ministère de la Santé a le devoir de les prendre.
Depuis janvier et mon annonce, j’ai participé à plusieurs réunions avec le Préfet et l’ARS, et lancé une pétition par ailleurs soutenue par près de 5 000 personnes.
Malheureusement, et en dépit de nos efforts, les solutions proposées par l’ARS reposent exclusivement sur une réorganisation interne des urgences de Manosque et font porter la responsabilité sur les médecins urgentistes : une réponse qui n’est pas à la hauteur des enjeux.
Malgré tout, je tiens à souligner et vous présenter le travail accompli aux côtés des médecins libéraux et la direction de l’hôpital depuis trois ans, avec lesquels nous avons réussi à mettre en place plusieurs avancées significatives pour la santé sur notre territoire.
- La création d’une maison médicale de garde ouverte tous les dimanches et jours fériés, assurée par les médecins libéraux du territoire, pour décharger les urgences.
- L’installation du Pôle Med, un centre de soins non programmés, ouvert du lundi au vendredi en complément de la maison médicale de garde.
- Le développement de l’internat qui nous permet d’accueillir désormais une vingtaine d’internes contre seulement cinq en 2020. Un accueil largement favorisé par les dispositifs que la Ville a initiés, en complément de ceux menés par le Département et la Région. Aujourd’hui, un interne à Manosque bénéficie d’un logement, d’une prime et d’une bourse.
- La création de 16 postes dans plusieurs spécialités (cardiologie, oncologie, dermatologie, rhumatologie, médecine infectieuse, néphrologie…) permettant là aussi aux habitants du territoire de trouver en proximité des expertises médicales manquantes jusqu’alors.
- L’obtention, avec le Président de Région, Renaud Muselier, de la sauvegarde de la maternité qui a par ailleurs été labellisée « Ami des Bébés » après plusieurs années de préparation et de formation. Ce label national récompense ainsi l’engagement des professionnels de maternité et de néonatalogie auprès des familles.
- L’installation d’un deuxième IRM afin de réduire les délais d’attente pour les habitants du territoire.
Enfin, l’extension de l’Hôpital. Il s’agit là du dernier projet que je mènerai en tant que Président du Conseil de surveillance et il m’apparaît important de vous apporter des précisions sur ses ambitions.
Ce projet structurant a été approuvé à la quasi-unanimité le 9 juillet dernier en conseil communautaire mais il a également été voté par les conseils municipaux des villes de l’agglomération.
L’Hôpital bénéficiera ainsi d’un espace dédié à l’unité de soins palliatifs avec un total de 12 lits afin d’accompagner dignement les patients en fin de vie, avec le financement de fonds européens, de la Région et de l’ARS. Cette extension permettra dans le même temps d’augmenter le nombre de lits dédiés à la médecine interne au sein même de l’établissement.
Avec ce projet, j’ai également souhaité permettre à notre territoire de développer une offre de formation médicale et paramédicale au sein même de l’hôpital. Cela nous permettra de pérenniser les formations en IFAS-IFAP obtenues auprès de la Région en 2023 et 2024, tout en accueillant de nouvelles : préparateurs en pharmacie, ambulanciers ainsi qu’une antenne IFSI. A terme, ce sont plus de 150 étudiants par an qui seront accueillis, contre 0 en 2020. Cela permettra à la fois à notre jeunesse de bénéficier de formations supérieures sur le territoire mais également de former chez nous et en proximité. L’installation des formations paramédicales sera financée par les collectivités territoriales (EPCI, Communes et Département) afin de préserver les moyens financiers de l’hôpital qui doivent être affectés au soin des patients.
Naturellement, cette décision est le résultat d’un long travail de concertation avec les maires de l’agglomération.
Cet effort financier représente concrètement 30€ par habitants à l’échelle de notre Agglomération. Je suivrai avec attention ce projet qui est essentiel pour garantir la dignité en fin de vie et préparer l’avenir de notre jeunesse ainsi que l’attractivité de notre hôpital.
Sur ce projet désormais validé par les élus du territoire aussi bien à l’échelle communale que communautaire, j’attends dorénavant un engagement de la part de l’État : j’ai ainsi d’ores et déjà sollicité le Préfet des Alpes-de-Haute-Provence et l’ARS pour leur rappeler leurs responsabilités respectives.
Bien que je démissionne de la présidence du conseil de surveillance, soyez assurés de mon engagement continu pour que chacun d’entre vous dispose d’un accès à des soins de qualité.
Je vous remercie pour votre soutien continu et votre confiance.
Camille GALTIER
Maire de Manosque
Président de DLVAgglo
Président du groupe majoritaire au
Conseil départemental des Alpes-de-Haute-Provence