L’hôtel de ville de Manosque recèle des trésors, dont ce buste en argent, classé Monument Historique depuis 1909, du fondateur de l’Ordre des Hospitaliers, Gérard Tenque, mort en 1120.

À l’origine, cette tête faisait partie d’un buste-reliquaire contenant des ossements que la tradition locale attribuait à Gérard Tenque. Mais de récentes études ont montré que les reliques n’étaient probablement pas les siennes mais celles de Saint-Géraud, vénéré à Manosque pour faire tomber la pluie en cas de sécheresse, lors d’une procession ancestrale. Ces ossements étaient conservés dans la chapelle du Château des Hospitaliers, situé sur l’actuelle place du Terreau à Manosque. C’est en 1613 que les Hospitaliers ont « trusté » littéralement le culte et les reliques de Saint-Géraud pour les réattribuer à leur fondateur. Sans doute la ressemblance entre les deux noms et la tombée en désuétude de la procession ont elles contribué à cette usurpation. Dés lors, Gérard l’Hospitalier a évincé Saint-Géraud.

Bustes en argent

Au 17ème siècle, deux bustes en argent furent réalisés simultanément pour contenir ces reliques : l’un commandé par le bailli Jean-François de Puget-Chasteuil, le second, plus prestigieux, aurait été réalisé par le célèbre artiste marseillais, Pierre Puget. En 1793, lors des troubles révolutionnaires, les cloches et objets en métal des couvents et chapelles ont été envoyés à la fonderie et les deux bustes en argent également. Quelques fragments de reliques furent sauvés et enfermés sous le maître-autel de l’église Saint-Sauveur. Quand la situation s’apaisa, on retrouva la tête d’un des deux reliquaires, celle-là même qui est aujourd’hui visible à l’Hôtel de Ville. Mais, était-ce celle commanditée par le bailli de Puget-Chasteuil ou celle qui aurait été réalisée par Puget ? Il est à noter qu’aucune trace d’une telle commande à l’artiste marseillais n’a été retrouvée dans les archives. On est en droit de se demander si une confusion entre les deux homonymes, le bailli et le sculpteur, ne serait pas la base de la tradition attribuant la sculpture à Pierre Puget. Un doute renforcé par le fait que celui-ci n’a, pour ainsi dire, jamais travaillé le métal. Il faut toutefois admettre que cette œuvre très réaliste est de grande qualité et peut être datée avec vraisemblance du 17ème siècle. Réalisée plus de 500 ans après le décès de Gérard Tenque, il s’agit d’un portrait « supposé ». Longtemps recouverte d’une peinture polychrome, elle a été totalement décapée au milieu du 20ème siècle.